mardi 26 février 2013

Une journée de merde


Il y a des jours où rien ne va. Manifestement hier était l’un de ceux-là. Ça commence par le petit doigt de pied qu’on cogne au coin du lit, puis l’on marche sur un jouet qui n’a pas été rangé et qui fait pimpompin donc réveille le bébé, qui pleure et réveille sa sœur et tout ça à six heures du mat. Le reste de la journée n’est qu’une succession d’évènements similaires. C’est facile de croire en la schcoumoune. J’ai toujours refusé de m’y abaisser ou de le prononcer sait-on jamais. Je veux rester maître de ma vie le plus possible et laisser l‘arbitraire, le hasard, la fatalité à distance. Mais hier, j’étais guidé par la maladresse, le pas de bol.

Oscar et moi avons voulu passer le samedi ensemble. C’est pas souvent qu’on se retrouve tous les deux, et j’aime bien quand ça se présente. On a commencé la journée par un casting. Oscar a fait le mannequin pour une marque de vêtements d’enfants. J’ai des principes et je n’ai jamais voulu que mes enfants soient dans une agence de mannequins. Pourtant, sans me vanter, je pense qu’ils sont les plus beaux enfants du monde, mais l’idée de courir les castings ne m’a jamais branché et puis je n’aimerais pas qu’ils grandissent en pensant qu’ils sont les plus beaux ; y’a que moi qui le sait, ils doivent se concentrer sur d’autres choses essentielles de la vie comme le partage, le travail, la gentillesse, l’humour pour ne citer qu’eux. Rosie passe assez de temps devant sa glace à chanter ou à se maquiller, comme moi. Pour le maquillage. Elle n’a pas en plus besoin d’un regonflage d’ego, d’ailleurs elle m’a dit un jour qu’elle savait qu’elle était belle que je n’avais pas besoin de lui dire tout le temps. C’est donc réglé. 



Mais Oscar étant plus âgé j’ai fait une exception, j’aime aussi revoir mes principes d’éducation quotidiennement. Il y a un an, il m’a demandé pour faire comme son copain Joe, de s’inscrire dans une agence de mannequin. Après des heures de réflexion, un retour sur mes notes et sur ce que je pensais déjà, des enfants mannequin, une réunion au grand sommet avec moi, Pip, Rosie et George, je me suis dit qu’Oscar était beau et qu’il était temps de mettre en pratique mon concept du partage.  Partageons sa beauté avec le reste du monde sur des affiches 4 par 4. Il était assez grand pour décider et il avait assez confiance en lui. Au bout de trois mois à me tanner pour le faire, j’ai cédé.




Nous avions pris la chose au sérieux, fait des études de comparaison de la meilleure agence. Rencontrer plusieurs personnes, dont des arnaqueurs, pour finalement envoyer des photos à la plus respectable de Londres, parce qu’on aime la qualité et qu’on a un produit de qualité à leur offrir. Heureusement qu’Oscar a la ténacité d’un poisson rouge car une fois l’inscription faite, il ne m’en a jamais reparlé. Et c’était tant mieux puisque l’agence ne m’a jamais rappelé non plus. Chacun chez soi et les moutons sont bien gardés. Aucun de nous ne s’est demandé pourquoi, tout le monde s’en foutait, bien au courant de la superficialité de cet univers. Jusqu'à la semaine dernière, où on lui a proposé son premier casting. Nous étions donc en route pour une journée à deux et l’idée nous enchantait. Sauf que voilà, j’ai commencé cette journée du pied gauche.

Retour en arrière : après le casting, qui s’est, ma foi, très bien passé, Oscar était regonflé à bloc, heureux de lui. On a décidé de se faire un snack sur le pouce et un ciné. Bon public, on était près à voir n’importe quoi, du moment que la séance était à midi.
Seul, Zero dark thirty coïncidait à notre emploi du temps serré. Nous voilà en route pour la chasse à Ben Laden. On fait la queue, on fait des blagues, l‘ambiance est bonne jusqu'à ce que j’entende Oscar dire au guichetier «  j’ai 15 ans ! Oui monsieur » je fouillais dans mon sac, concentrée sur mon porte monnaie et je m’entends dire haut et fort « non, il a 14 ans, Oscar tu as 14 ans ! ».
J’aime que les choses soient claires, j’aime la justice et la vérité. J’étais aussi confuse, toujours fixée sur la finance, je voulais payer le prix ado et non adulte. Je n’ai pas réfléchi vraiment à ce que je disais, j’ai été con c’est tout.  Pour  3 euros de différence, nous nous somme fait refuser l’entrée. Le film est interdit au moins de 15 ans.
Oscar m’a regardé du haut de son mètre quatre vingt, l’air désabusé comme s’il avait envi de changer de maman. Il a soupiré. Oscar est grand, il pourrait dire qu’il a 25 ans qu’on pourrait le croire. Il est grand, beau, comme on le sait déjà, et a une aura, une assurance de jeune homme plus âgé que son âge, il fait mature. Je le revois maintenant, l’assurance avec laquelle il a dit «  j’ai 15 ans » à ce mec, qui lui demandait son âge, comme on demande l’heure. Il aurait pu lui faire avaler des couleuvres, l’hypnotiser, lui demander la caisse si ça lui chantait.
Mais non, rien de ça n’arriva, à cause de ma bêtise. Je n’ai pas compris qu’il essayait de nous sauver la mise puisque je ne savais pas que le film était un moins de quinze ans. Mais non, non, non, moi, la marâtre, toujours à rabrouer mon fils, j’ai toujours le dernier mot. Il a fallu que je l’ouvre ma grande bouche. Et voilà, le jeune homme au comptoir suant de doute, de peur de se faire virer, de ne plus jamais vendre de popcorn de sa vie, nous a refusé la vente de tickets. Malgré mes « mais ! Je suis sa mère !!! Je peux décider quand même » Please ? »

Réunion. Oscar a le droit de m’engueuler, je prendrai sur moi, j’ai fermé les yeux en m’attendant vraiment à une volée de bois vert. Ça serait la seule fois de sa vie, qu’il en profite. Et il ne s’en gêne pas, oh oui allons y de « Mais maman, qu’est-ce que tu fous, il avait rien vu le mec, t’es vraiment…. !!!! ». Il avait le choix :
Débile, sotte, arriérée, à l’ouest, à la rue, pas cool, neuneu…

Mais il n’a jamais fini sa phrase car une larme a coulé sur ma joue, juste une, que j’ai rattrapée avec ma langue, reniflée puis je me suis redressée pour lui dire « viens, on va voir un autre film, on a pas fait toutes ces bornes pour rien ». J’ai lu de l’admiration dans ses yeux. Il a vu mon courage et senti que je me battrai contre une armée pour lui faire plaisir.



C’est comme ça qu’on a choisi d’aller voir Lincoln. Un peu d’Histoire, je me suis dit que ça ne ferait de mal à personne ; et puis Daniel Day Lewis, c’est conseillé quand on a le moral dans les chaussettes.
Cette histoire m’a embêté. Quelle conne j’ai été, où était mon cerveau, qu’est-ce qui m’a pris ? Pourquoi, des fois, je ne réfléchis pas avant de parler? Bref, j’étais dans les toilettes à réfléchir à tout ça, faisant  mon pipi, le papier dans une main, les tickets dans l’autre, je réfléchissais, et je réfléchissais, je me refaisais la scène, invoquant les mauvais esprits et puis dans le feu de l’action je me  suis trompée de main  pour m’essuyer. Bien là, j’avais à mon tour deux options : me faire Harakiri du haut de l’escalator du centre commercial ou rigoler, parce que c’était tellement tropico qu’il valait mieux en rire. Une deuxième larme a coulé mais cette fois d’amusement.




Merci à Cécile Petit pour ses illustrations burlesques et explosives de couleurs. Voici son site pour ceux et celles qui en veulent plus et sont prêts à découvrir ses créations:







6 commentaires:

  1. toi ou julie, je vous laisse plus aux toilettes toute seule, vous ne faites que des bétises !

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  2. ccile, très jolies tes illustrations !

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  3. Xictime de ton succès tu es en tain de te faire spammer!!
    Biz
    KK

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  4. au secours des pirates sur ton blog !! que fait la police ??

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  5. Je pense que c'est parce que je deviens tres populaire avec cette histoire de blog ou alors c'est que j'ai mis MERDE en titre.

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